Le Festival Nuits de Champagne fêtera ses 30 printemps en octobre prochain et propose une nouvelle formule pour aborder cette nouvelle décennie d’activité. Nous avons donc posé quelques questions à Sylvain Tardy qui a été chargé de mener le travail de réflexion et de redéfinition du projet avec l’équipe du festival et ses partenaires.
Pouvez-vous nous expliquer le nouveau concept du festival ?
Sylvain : Le festival des Nuits de Champagne va proposer, chaque année, un voyage dans un univers artistique
inspiré de répertoires croisés et intergénérationnels, en compagnie d’artistes parrains invités du festival, pour des
Nuits qui chantent plus que jamais ! Ce voyage sera jalonné de rendez-vous artistiques pluridisciplinaires en fil rouge au cœur d’une programmation qui proposera l’actualité de la chanson française ouverte sur les tendances et les sons d’un monde qui bouge, dans une ville en fête.
Quel est le processus qui vous a amené à prendre cette nouvelle direction ?
S : Les acteurs culturels sont confrontés à une mutation profonde des modes de consommation et des métiers de la musique qui affecte les carrières des artistes et leur relation au public, et fragilise la notion-même de répertoire –au sens d’un patrimoine vivant partagé par un public suffisamment large pour constituer une culture commune. Cette notion est vraiment importante dans l’aventure de ce festival qui s’est consacré pendant les 25 dernières années à l’écriture de la chanson et aux métiers d’auteur et de compositeur. Nuits de Champagne a donc engagé voilà près de 2 ans une mission d’étude pour dresser un état des lieux partagé de son concept, de son programme, de son fonctionnement et de son rayonnement, puis tracer des perspectives pour s’engager renforcé dans sa 4ème décennie, le festival célébrant sa 30ème édition en octobre 2017 ! Nous avons associé une centaine de personnes à cette réflexion, acteurs du festival, partenaires, collectivités, acteurs culturels du territoire, festivals amis… C’est ce large échange qui a débouché sur l’évolution proposée aujourd’hui.
Et du coup, comment s’est passé la préparation de cette première édition sous ce format ?
S : Il faut bien l’avouer, ça s’est passé un peu dans l’urgence, ce qui n’est pas exceptionnel pour la préparation de ce genre d’évènement… Changer de concept, de programme et d’organisation tout en préparant activement l’édition suivante ne se fait pas sans contraintes ! Mais en même temps, nous avons vraiment confiance dans ce nouveau concept et son potentiel, confiance entretenue par l’enthousiasme avec lequel ce projet d’évolution a été accueilli par les interlocuteurs auxquels il a été présenté… Il semble bien que nous ayons réussi à nous appuyer sur l’ADN
du festival pour aller encore plus loin et le faire évoluer avec son temps.
Pouvez-vous nous en dire plus sur le fil rouge ?
S : Nous pouvons en dire plus sur le principe du fil rouge en tout cas ! Il s’agit de prolonger la programmation hors des salles de spectacle habituelles, dans différents lieux du centre-ville, avec des propositions artistiques pluridisciplinaires illustrant l’univers mis à l’honneur : desconcerts acoustiques, mais aussi des expositions, des projections, des lectures ou encore, pourquoi pas, de la danse, des arts de la rue, etc. L’occasion de faire le lien avec d’autres pratiques artistiques mais aussi de cultiver cette envie très actuelle de mêler les arts entre eux comme l’expérimentent la plupart des artistes de la scène musicale d’aujourd’hui.
Le Grand Choral conserve-t-il une place centrale dans le projet du festival ?
S : Les créations polyphoniques (l’Aube à l’unisson avec le Chœur de l’Aube et ses 700 collégiens, et le Grand
choral formé par 900 chanteurs venus de toute la France et même au-delà) font en effet partie de l’ADN du festival. Les acteurs et amis des Nuits de Champagne y sont fortement attachés. Elles restent donc des rendez-vous
incontournables ! Mais au-delà, pour répondre à la très forte aspiration au « chanter ensemble » qui s’exprime aujourd’hui sous des formes multiples, nous allons développer le concept des Nuits qui chantent et décliner
de nombreuses propositions pour que chacun puisse donner de la voix : en marge et en prolongement des concerts, tout au long de la semaine lors de happenings chorals, ou bien avec des ateliers chantants pour tous…
Les anniversaires c’est aussi l’occasion de jeter un coup d’œil dans le rétroviseur. Quels sont les moments marquants de l’aventure des Nuits de Champagne ?
S : Nous ne souhaitons pas verser dans la célébration car Nuits de Champagne se vit au présent ! Après, chacun
a sans doute des souvenirs et un regard unique sur cet évènement : il n’y a pas deux personnes qui ait eu les mêmes coups de cœur sur 30 années, bien sûr… Donc, de manière totalement subjective : le premier Grand choral
autour des chansons du poète Etienne Roda-Gil ; l’excitation contagieuse de la nombreuse délégation québécoise de l’édition Starmania (Plamondon/Berger) en plein référendum pour l’indépendance du Québec ; la rencontre avec
Claude Nougaro ; le cadeau de la présence du baryton José Van Dam ; « Let the sunshine » au Grand choral de Julien Clerc ; la complicité de Francis Cabrel et Alain Souchon, co-invités pour fêter l’an 2000 ; les échanges en toute simplicité avec la légende Charles Aznavour ; les torrents de larmes sur les joues de Renaud au milieu du public de son Grand choral ; l’aura incandescente de Michel Jonasz ; l’émotion brute de Véronique Sanson ; la transe façon « Carnaval de Rio » avec Bernard Lavilliers ; la profondeur magnétique d’Alain Bashung ; les concerts
inoubliables de Stephan Eicher, Michel Rivard, -M-, Camille, Yael Naim et tant d’autres ; Maxime Le Forestier qui chante Brassens ; la fête à Louis Chedid ; la communion festive avec Tryo ; la puissance des chansons de Jacques Brel, si vivant ; les yeux embués de Pascal Obispo lors de sa rencontre avec « son » grand chœur ; quelques afters et leurs bulles partagées… et chaque année les premières notes de ces centaines de voix ensemble au début du Grand choral du samedi soir !
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