À Tantôt a fêté sa première année très récemment. À cette occasion, Vincent Risbourg a répondu pour nous à quelques questions pour nous permettre de saisir les projets de cette association et son évolution au cours de sa première année d’existence, puis nous a livré les actualités brûlantes des prochaines semaines.
Tu peux commencer par nous parler de ton parcours, d’où tu viens ?
Vincent : J’ai commencé par être animateur en centre social. J’ai un diplôme d’animateur technicien. Quand je suis arrivé à Reims, j’étais animateur à Radio Phare (1983-2008), et ensuite à Radio Primitive pendant pas mal d’années. Après mon boulot d’animateur, j’ai intégré la Fnac un peu sur un coup de poker et j’y suis resté pendant treize ans. J’ai appris pas mal de choses sur le business de la musique, la distribution du disque, le label, la promotion, tout ça. Et en parallèle, j’ai commencé à organiser quelques concerts. D’abord pour aider quelques amis et puis assez rapidement c’est devenu régulier. Pendant trois ans j’ai organisé des concerts sans structure. La plupart du temps c’était à l’Appart Café, sauf un after work avec Bob Log III à la Cartonnerie.
J’ai profité de mon licenciement pour avoir une formation à l’IRMA (centre d’information et de ressources pour les musiques actuelles) qui m’a permis d’acquérir énormément de savoirs et de compétences et de développer mon réseau, car j’ai rencontré beaucoup de gens.
Comment t’es venue l’idée de créer À Tantôt ?
V. : Travailler avec une structure juridique ça me semblait important, parce qu’on commençait à rentrer dans des obligations de rendus par rapport à des demandes de subventions, et par rapport à une visibilité auprès des partenaires institutionnels. On a donc créé À Tantôt avec Sophia Fennich. Il fallait aussi donner une visibilité particulière aux concerts, avec un logo. Il n’y avait pas de projet, ça s’est fait au fur et à mesure. Après les chroniques et les reports que j’ai fait pour Arteos, un groupe m’a demandé de lui écrire une bio. Comme ils avaient besoin d’un diffuseur, on s’est retrouvé aussi à faire du booking. Pour cela il nous fallait des outils de prospection, pour pouvoir faire de la com pour les groupes, et de fil en aiguille on est rentrés assez rapidement dans le développement et le management.
Tu peux nous faire un rappel des activités de l’association ? Parce que justement, ce n’est plus seulement de l’organisation de concerts aujourd’hui ?
V. : En plus des organisations de concerts, on fait tout ce qui est accompagnement, développement et management de groupe. On travaille pour l’instant avec Grand Morse, Baptizein & Secret Yolk et Judy. On est très certainement appelé à travailler avec d’autres groupes. En ce moment, on est en train de réfléchir à garder l’association pour faire tout ce qui est promotion de concerts et à monter une autre structure juridique pour tout ce qui est management, parce que c’est un cadre très légiféré. Il faut notamment être inscrit au registre des agents. La troisième idée, c’est de faire aussi de l’action culturelle. C’est ce que j’ai envie d’apporter. Ça me vient de ma première formation. Le but serait d’apporter la musique à des publics qui n’ont pas de facilité d’accès à des styles comme la pop, le rock, le blues…
Un avis sur le 360° ? C’est un terme assez à la mode, plutôt utilisé par les majors mais du coup ça a contaminé le milieu indé ?
V. : C’est complétement ça. Arrivé à un moment, lorsque tu commences à vouloir toucher à du booking ou à être tourneur pour un groupe, tu te rends compte que tu as besoin d’outils prospects et que ça, les groupes ne savent pas le faire. Tu crées les outils et ensuite il faut diffuser. Tu te retrouves attaché de presse pour eux, tu leur trouves un label puis des dates et après tu rentres dans tout ce qui est administratif sur les signatures de contrats, qui peuvent être aussi bien des contrats d’engagement d’artiste mais aussi des contrats d’édition musicale ou de rapporteur d’affaire.
Et du coup, l’idée de sortir des disques avec les groupes t’es venue en tête ?
V. : Bien sûr. De toute façon, en discutant avec d’autres acteurs comme Etienne Bouzy (NDLR : Responsable du Kiosque – Infos – Ressources à la Cartonnerie de Reims), Guillaume Gonthier (NDLR : Responsable accompagnement artistique à la Cartonnerie de Reims) ou Jean-Christophe Urbain (NDLR : Coordinateur du réseau Pole Sud Musique à Reims), on sent très bien qu’au niveau local, et même départemental et régional, il y a un manque à l’heure actuelle pour les groupes. Qu’ils soient en développement ou en voie de professionnalisation, il leur faut un label, un booker, et un peu de promo presse donc un attaché de presse. Et c’est un truc qui manque vraiment. Ce sont des compétences qu’on doit aller chercher nécessairement ailleurs, très souvent à Paris. On réfléchit avec d’autres personnes à l’opportunité d’essayer de se fédérer. C’est encore très balbutiant tout ça. Mais avoir une grosse structure de booking qui aurait par exemple différentes holdings sur des types de musique particuliers, ce qui permet d’avoir des rosters particuliers, c’est une piste. Pareil pour le label. On pourrait avoir un gros label À Tantôt, avec un À Tantôt Rock, À Tantôt Blues… Enfin, on continue de mener un réflexion sur la diffusion, qui a été notre première activité. On a la chance de travailler avec des salles comme la Cartonnerie, avec des jauges à 150 sur le Floor, à 450 sur le Club et plus de 1000 sur la grande salle. Mais on aimerait aussi une salle un peu plus alternative, de plus petite jauge, pour pouvoir travailler avec des associations comme Zgala ou d’autres pour organiser des concerts. Les concerts gratuits c’est très bien mais à partir d’un moment, on sait très bien qu’on ne peut pas rémunérer les artistes avec un juste cachet…
Tu peux nous parler des prochains événements avec lesquels vous êtes associés ?
V. : Tout d’abord, mercredi 1er et jeudi 2 juin, il y aura deux soirées de concert pour lesquelles À Tantôt est partenaire avec la Cartonnerie : les Teenages Kicks, où on verra une programmation exclusivement rock’n’roll. Le 1er juin, ce sera du rock garage plutôt orienté américain avec The Black Lips, Dirty Fences, Night Beats, Chocolat et Luke Winslow-King,qui est un musicien de la Nouvelle Orléans qui fait plutôt du swamp blues. Le jeudi 2 juin, ce sera The OBGMs, Downtown Boys et Declan McKenna. Là on est sur un côté légèrement plus punk anglais. En plus de ça, on profite de ces deux jours pour faire une sorte d’événement dans l’événement, avec l’invitation de labels de rocks alterno comme Teenage Menopause, Le Turque Mécanique, mais aussi des locaux avec Poutrage, Discolexique, et BeCoq. Ça sera un moment de rencontres super intéressant avec des events un peu touchy comme la présence d’un barbier, d’un tatoueur, ou encore d’une machine à faire des patchs rock’n’roll. On va refaire de la déco, on va transformer le club en un vieux juke-joints – des anciens bars clandestins américains où les métayers venaient après le boulot pour danser et écouter de la musique. Il y aura encore d’autres surprises : une concentration de vieilles bécanes, des mecs qui viendront passer du sound…
Ensuite, le 23 juin la mairie nous accorde sa confiance en nous proposant une carte blanche au Cryptoportique pendant un « Été à Reims », ce qui nous permet de programmer deux artistes que j’aime beaucoup et que j’essayais de faire jouer depuis longtemps. Le premier c’est Possessed by Paul James, un artiste américain folk que j’avais déjà fait jouer il y a trois ans. C’est un one man band qui joue du banjo, du violon, de la guitare et du foot stomp. C’est une sorte de folk ultra hantée, ultra habitée. Il est très charismatique. Et le deuxième, c’est un artiste de blues suédois, Bror Gunnar Jansson. C’est un peu l’étoile montante de la nouvelle scène blues. Attention quand je dis blues, ce n’est pas le blues à la papa façon Buddy Guy. Là on est plutôt sur un blues cabaret, avec des accents berlinois années 30 mélangés à du Tom Waits. C’est un univers très particulier. Il a été suivi par les inrockuptibles, est passé sur le Grand Live de Canal +. Là, il va faire deux dates complètes à la Boule Noire. Bref, on est très content.
Enfin, si je peux me permettre, je finirai avec l’actualité nos groupes. Grand Morse va jouer au Zzze Festival. On prépare la sortie d’un EP pour Judy à la rentrée, et il va y avoir pas mal de promo et de presse cet été, ils sont suivis par les Inrocks lab et par Tsugi. Et ils feront un concert privé à Paris le 14 juin. Enfin, Batptizein & Secret Yolk seront en première partie de Moon Duo le 14 juin à la Cave aux Poètes de Roubaix et aussi en première partie de Johnny à Sedan le 29 juin…
Crédits photo : Polca / Thomas Morelle / dr.
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