Deux ans après leur premier album « Blood Was Running From Their Ears », Feu Robertson manipule encore le folk et le rock avec magie et revient avec neuf titres sur ce second album « Sticky Situations With Troubles ».
On plonge d’entrée de jeu dans un une autre dimension où le temps s’allonge. Tout au long de ces sept minutes trente-sept secondes, le titre d’ouverture gagne progressivement en intensité. Le chant s’ajoute de manière subtile à l’instrumental, sans jamais trop en faire, sans jamais trop s’effacer non plus. C’est seulement passée la troisième minute et demie que « Young Wooly Rhinocerous » vient chatouiller les oreilles pour nous entrainer dans une énergie qui contraste avec l’introduction paisible qui avait démarré au son des cloches. Les deux titres qui suivent sont eux aussi suspendus dans le vide avec une rythmique lente, mais dans un registre mélancolique, en abordant, entre autres, le thème du manque. Dans « Jungle Life », le groupe nous tient en haleine, se jouant de nous. Il n’hésite pas à repartir sur une nouvelle mélodie, créant ainsi la surprise, la curiosité. « Jungle Life » est l’une des chansons les plus longues de cet album, mais elle prend un virage à la troisième minute et sonne comme un cri, un appel sans espoir. Brut. Humain. Qui ne s’épuise pas mais s’adoucit. « Low Future » commence par un passage aux résonnances psychédéliques, une voix désincarnée récite les premiers couplets. Ensuite, la chanson devient entrainante et incite à danser. Mais cela ne suffit pas. Il faut tout envoyer valser pour qu’une libération de l’ordre du physique s’opère et nous traverse de la tête aux pieds sur les dernières minutes. « Dark Blue » est assurément plus folk sans s’y enfermer néanmoins. Ce titre est aussi plus proche du premier album du groupe. Mais ce n’est que le temps d’un instant. Court en comparaison des autres titres, c’est d’ailleurs la chanson la plus courte de l’album. « On The Boundary » sonne comme un apaisement, parfois plein de douceur, parfois subtilement sauvage. De nouveau le titre est découpé en plusieurs phases de manière romanesque. Une histoire se joue avec quelques mots partagés, et surtout des atmosphères variables, nuancées. « Sticky Situations With Trouble » se termine calmement – un peu comme un tendre au revoir. Ce nouvel album vient affirmer l’identité du groupe, que l’on sent plus forte. Une marque de fabrique où les titres sont défaits de la contrainte du temps, et desquels émane avec finesse une énergie et une puissance indéniable.
Emeline